1 octobre 2014

Georges Grosse, doyen d’Anderny (1916-2014)



 

Avec la disparition de Georges Grosse, décédé le 31 août 2014 à l’hôpital de Briey, c’est une figure locale attachante et sympathique, intimement liée à l’histoire d’Anderny, qui vient de nous quitter. On imaginait que le doyen du village était promis à devenir centenaire tellement il jouissait encore, jusqu’à ces derniers mois, d’une belle vitalité et d’un solide caractère. Pourtant, au cœur de l’été, il s’est éteint discrètement, après une courte hospitalisation, à l’âge de quatre-vingt-dix-huit ans. Ses obsèques ont été célébrées en l’église d’Anderny, le mercredi 3 septembre. Il repose désormais auprès de son épouse, dans la sépulture familiale, au cimetière communal.
   Georges Grosse a vu le jour à Anderny, pendant la grande guerre, le vendredi 17 mars 1916. Son père, Charles, jeune agriculteur de vingt ans, originaire de Sancy, avait su conquérir le cœur de Marie-Thérèse Vingert, fille cadette de Nicolas, exploitant l’une des fermes du village. Le couple aura encore trois autres enfants, Lucie, Jeanne et Paul Grosse.
   Tout comme son père, Georges Grosse a exercé pendant de nombreuses années la profession de cultivateur. Mettant en valeur la ferme dite du château, située à côté de l’église. Il avait pris sa retraite en 1974.
  En 1940, il est mobilisé comme caporal-chef au 150ème régiment d’infanterie de Verdun, rattaché à la 12ème division d’infanterie motorisée. Stationnée au Nord de Thionville, au moment de la déclaration de guerre, son unité passe ensuite en Belgique et tente de s’opposer à la progression des troupes allemandes. Ayant reçu l’ordre de se replier, elle franchit la Meuse et, échappant à l’ennemi, gagne Dunkerque par Valenciennes et Lille. La 12ème division d’infanterie motorisée participe courageusement à l’Opération Dynamo en protégeant le départ vers l’Angleterre des troupes franco-britanniques. Ses survivants sont faits prisonniers le 4 juin 1940, au matin, sur la plage de Malo-les-Bains. Georges Grosse est envoyé en détention en Allemagne. Après trois tentatives d’évasion, il est enfermé au Stalag disciplinaire de Rawa-Rusk, près de la frontière polonaise (aujourd’hui en Ukraine). On connait la dureté des conditions de vie dans ce camp de représailles où périrent de nombreux détenus français et belges. Quand il est libéré, en 1945, il ne pèse plus que quarante-huit kilos. 

  De retour en Lorraine, Georges Grosse a épousé, en février 1949, Marie-Félicie Dangeville, originaire d’Elange en Moselle. Ils ont eu trois enfants : Josiane, Robert et Evelyne.
  Avec la disparition de notre alerte doyen, la famille Grosse perd son dernier représentant au village. Elle y était établie depuis presque un siècle. Charles, le père de Georges, est venu au monde à Sancy, le 23 octobre 1896, village où sont également nés ses deux sœurs, Jeanne-Barbe (1890-1970) et Ernestine-Léonie (1893-1964), ainsi que son frère, Emile-Eugène (1892-1972). Quand à Victor Grosse, le grand-père de Georges, il était originaire de Bousse, petite bourgade située sur la rive droite de la Moselle, entre Metz et Thionville, où il était né en 1858. Après s’être marié à Anderny, le 10 août 1889, avec Marie-Clotilde Sabouret, il s’est ensuite fixé à Sancy, comme cultivateur, et est décédé en 1918. Son épouse s’est éteinte en 1961, à l’âge de quatre-vingt-treize ans.
  Tous comme les familles Vingert, Reitz ou Thirforck, les Grosse avaient choisi de quitter la Moselle, quelques années après son annexion par l’Allemagne, pour venir s’installer en France. En l’occurrence à Anderny. Dans la seconde moitié du XVIIème siècle, l’ancêtre, Jean Grosse, vivait à Kuntzig, à quatre kilomètres au Sud-Est de Yutz. L’un de ses petits-fils, Jean (1703-1788), alla s’établir comme cabaretier à Rurange, près de Thionville, et ses descendants y vécurent jusque dans les années 1830, période au cours de laquelle ils émigrèrent à Bousse.
  Malgré son grand âge, Georges Grosse n’a jamais voulu quitter son village natal. Se justifiant de cet attachement en répondant, avec son habituel bon sens, qu’on ne déracine pas un vieil arbre. Très attaché à ses enfants et petits-enfants, passionné par la politique, mécène discret, il avait été nommé récemment chevalier de la légion d’honneur.


J.-J. J.